La fonction intégrative de la théorie
Entre 1987 et 1989, Owens donne des enseignements théoriques dans les départements d’art et d’histoire de l’art de Yale University, University of Virginia, Barnard College et The School of the Art Institute de Chicago, qu’il conçoit de manière à traiter l’activité culturelle « comme une profession ».46 Comme il l’explique dans sa lettre de candidature pour Rochester, cela consiste, pour lui, à transmettre à ses étudiant·es « un savoir utile » pour comprendre ce que travailler en tant qu’artiste ou critique d’art signifie. Ses cours, insiste-t-il, s’appuient, pour ce faire, largement sur l’expérience professionnelle qu’il a lui-même développée dans le milieu artistique new yorkais depuis la fin des années 1970, en tant que critique d’art, rédacteur dans des revues spécialisées, commissaire d’exposition et enseignant.
Il pense ainsi ses enseignements comme un parcours à travers les différents débats artistiques et théoriques dans lesquels il s’est lui-même investi, afin d’offrir une lecture située de ce qu’il considère comme étant les principaux enjeux qui articulent la conversation du champ de l’art actuel occidental. Pour Owens, cette cartographie des pratiques artistiques les plus actuelles ne peut se résumer à une sélection établie à partir de critères formelles et esthétiques. Elle doit, au contraire, être construite en lien avec une lecture problématisée du champ culturel contemporain. Elle nécessite, de ce fait, d’initier les étudiant·es aux outils théoriques et méthodologiques qu’il mobilise dans ses propres écrits et qui sont issus de corpus variés, alors rassemblés sous l’intitulé vague de Théorie, tels que la French Theory, le Psychoanalytic Feminism, la Film Theory, ou encore la philosophie de l’École de Francfort. Il explique à propos de ses cours : « une grande partie du temps est consacrée à des textes sur l’historiographie, la sociologie, le langage, la subjectivité et l’idéologie, dans le but de fournir aux étudiants les outils nécessaires pour se situer – en tant qu’artiste, critique, historien, administrateur, et même en tant que membre (informé) du public – dans le monde social complexe auquel appartient la production culturelle. »47 Loin de nourrir une spéculation purement abstraite, l’enseignement théorique a, pour lui, une double visée : d’une part, il doit permettre à l’étudiant de comprendre sa place et son action dans le champ professionnel dans lequel l’étudiant·e s’engage, d’autre part, il doit l’amener à acquérir des éléments de langage et de pensée qui sont partagés au sein de ce même champ et qu’il est nécessaire de maîtriser pour s’y intégrer.
Comme l’explique Thomas Crow en 1988, la Théorie « fédère le village qu’est le monde de l’art à tous les niveaux […]. Le langage de la théorie sophistiquée a fini par remplir une fonction véritablement intégrative pour la communauté artistique telle qu’elle existe réellement, en rassemblant une grande variété de pratiques sous ses ailes. »48 Owens est d’autant plus conscient de ce phénomène qu’il en est lui-même partie prenante. Dans le New York des années 1980, souvent présenté comme « l’âge d’or de la Théorie »,49 Owens fait partie d’une communauté constituée d’artistes qui aiment écrire comme Joseph Kosuth, Robert Morris, Yvonne Rainer, et de critiques et universitaires comme Benjamin Buchloh, Rosalyn Deutsche, Hal Foster et Rosalind Krauss qui gravitent autour d’October et de différentes formations telles que la SVA, l’ISP, le Hunter College, le Graduate Center de The University of New York, The Institute of Architecture and Urban Studies. Participant aux mêmes débats et événements et intégrée dans des espaces d’enseignement institutionnels reconnus, cette communauté a développé, en partage avec la nouvelle génération d’artistes et d’intellectuels se formant à cette époque, une culture artistique fascinée par la Théorie, qui témoigne du rapprochement des mondes académique et artistique.
Cet engouement s’est développé depuis les années 1960 comme un phénomène concomitant de l’affirmation d’une posture artistique discursive, initialement associée à l’ensemble des pratiques rassemblées sous l’appellation d’art conceptuel. En 1971, l’artiste Mel Bochner, dont le travail a souvent été associé à cette appellation artistique, et qui est alors enseignant d’histoire de l’art à la SVA, écrit dans le journal de l’école : « De nombreux artistes contemporains estiment qu’une combinaison de disciplines disparates est nécessaire à la vitalité continue de leur art. L’artiste qui s’exprime clairement est aujourd’hui la règle plutôt que l’exception… Si l’on devait proposer un objectif pour l’éducation, ce serait peut-être de détrôner l’esprit et d’enflammer l’intellect. »50 Cette déclaration, aux accents de manifeste, s’accorde alors avec l’ambition professionnelle de la SVA qui, dès le milieu des années 1960, développe son pôle d’enseignement théorique en recrutant des critiques et des artistes qui soutiennent la figure de l’artiste-théoricien qui émerge alors et qui va acquérir plus de visibilité au cours de la décennie suivante sur la scène artistique new yorkaise.51 La sociologue Judith Adler constate ainsi, en 1979, dans Artists in Offices, que l’art conceptuel caractérisé par sa production textuelle, son « esthétique administrative » pour reprendre la célèbre expression de Benjamin Buchloh, son goût pour la publication et la théorie, « s’avère être un genre d’art académique finement adapté aux pressions du nouvel habitat universitaire. »52
Dans les années 1980, si les programmes de M.F.A. cherchent à former des « artiste[s] qui s’exprime[nt] clairement », en structurant notamment leur pédagogie autour de situations de conversation développées à partir du travail plastique de l’étudiant.e,53 Owens remarque que : « le discours théorique n’est en aucun cas dominant dans les écoles d’art. Mais il est intéressant que différentes personnes l’ait introduit au sein du champ académique. »54 Les différentes institutions dans lesquelles Owens a enseigné témoignent d’un intérêt progressif au sein de formations académiques réputées aux Etats-Unis, de s’équiper d’un enseignement théorique exigeant afin de soutenir la structuration de la parole de leurs étudiant.es et ainsi de s’intégrer plus facilement dans le monde professionnel. Le phénomène d’introduction de la Théorie évoqué par Owens coïncide avec la structuration progressive de l’histoire de l’art contemporain en tant que discipline dans le champ universitaire aux États-Unis à la fin des années 1980 : celle-ci va alors notamment se développer avec les recrutements, mentionnés précédemment,55 de plusieurs « critiques-théoriciens » qui, associés à October, ont également été des étudiants de Rosalind Krauss. La spécialisation « Histoire de l’art contemporain » étant encore quasiment inexistante au milieu de la décennie – seul.e.s trois professeur·es la représente alors dans tout le pays –,56 les départements d’art souhaitant se doter de cet enseignement, s’intéressent à des personnalités qui, comme Owens, ont acquis leur reconnaissance au sein du champ professionnel, tout en côtoyant le champ académique en tant qu’étudiant – Owens avait lui-même entrepris une thèse avec Krauss qu’il abandonnera au début des années 1980. Ce phénomène contribue alors à l’apparition d’une nouvelle figure d’historien d’art qui, au lieu d’étudier les productions du passé, embrasse l’approche du critique d’art ancré dans les préoccupations théoriques et les enjeux politiques du présent, et qui jette un pont entre les mondes professionnel et académique.
Comprenant le besoin existant au sein de l’institution universitaire de développer un enseignement de l’art contemporain, Owens explique dans sa lettre de candidature pour Rochester que les enseignements théoriques qu’il a donnés entre 1987 et 1989, l’ont amené pour la première fois à synthétiser ses différentes prises de position en tant que critique d’art et à souhaiter en faire un manuel qui offrirait un « cadre conceptuel et historique indispensable pour les cours sur la ‘culture postmoderne’ ».57 Conscient que ce savoir se situe à la croisée des champs académique et professionnel, il ajoute : « Je crois qu’un tel livre intéressera aussi des lecteurs extérieurs au champ académique. »58
Les enseignements théoriques d’Owens de 1987 à 1989
La rédaction de ce manuel serait également l’occasion, pour lui, de produire une révision globale de son travail, qui lui semble désormais nécessaire. Il précise: « d’autant plus que de nombreuses positions que je ne défendrais plus se sont avérées être plutôt influentes ».59 Les cours à partir desquels il aurait élaboré cet ouvrage sont ceux qui correspondent aux trois premières bibliographies reproduites dans la section « Pedagogy » de Beyond Recognition.60 Celles-ci témoignent en effet de la relecture qu’Owens opère de son parcours intellectuel à l’aune de sa pensée à la fin des années 1980, et notamment celle cristallisée dans « From Work to Frame » (1987). Leur étude permet d’entrevoir les pratiques et les références théoriques retenues pour synthétiser les différents débats qu’Owens juge nécessaire de transmettre à ses étudiant.e.s, afin de leur offrir un panorama consistant des enjeux du monde de l’art aux Etats-Unis à la fin de la décennie.
Datant de 1987 à 1989, ces bibliographies correspondent chronologiquement à la période au cours de laquelle Owens enseigne à Barnard College, Yale University et University of Virginia. Leur contenu et leur organisation en sections sont sensiblement similaires. « Postmodern Art 1971-1986 » et « Bibliography : Contemporary Art and Art Criticism » proposent de partir des pratiques artistiques pour aborder des questions théoriques, quand « Seminar in Theory and Criticism » procède à l’inverse. Le texte introductif de « Seminar in Theory and Criticism » semble résumer l’approche déployée dans ces trois cours : « Une réflexion sur le déplacement récent de la pratique critique depuis l’interprétation et l’évaluation des œuvres d’art individuelles vers l’analyse des multiples cadres dans lesquels la production et la réception artistiques sont contenues. »61 Évoquant l’analyse fonctionnelle défendue par Peter Bürger, ce texte introductif rappelle la promotion des enjeux liés au cadre institutionnel et aux conditions de production artistique développée dans « From Work to Frame » (1987), et reprise dans la lettre de candidature de Rochester. Les sections intitulées « From Work to Frame » et « Cultural Confinement » des trois bibliographies proposent d’ailleurs des références mentionnées dans l’essai de 1987 ou en lien avec les pratiques des artistes qui y sont analysées. Des reproductions de celles-ci, réalisées en novembre 1987 probablement pour le cours « Contemporary Art and Art Criticism », sont de plus conservées dans la collection de diapositives d’Owens.62
« The Death of the Author » et « The Birth of the Viewer »
Dans les trois bibliographies, les sections « From Work to Frame » et « Cultural Confinement » sont articulées à celles intitulées « The Death of the Author » et « The Birth of the Viewer » ; l’ensemble ainsi formé est de plus situé dans la première partie du parcours de lecture comme une entrée en matière. L’association de ces sections rejoue le mouvement de pensée proposé dans l’essai « From Work to Frame » (1987), dont le sous-titre est « or, Is There Life After ‘The Death of the Author’ ? ». Avant de développer sa réflexion sur le cadre et les pratiques qualifiées de Critique Institutionnelle, Owens pointe en effet dans la première partie de son essai le fait que les pratiques artistiques contemporaines qui enregistrent « La mort de l’auteur », identifiée par Barthes dans son texte éponyme de 1967, ne rompent pas totalement avec le questionnement moderniste.
Gerhard Richter, Guilio Paolini et Sherrie Levine, évoqués dans cette première partie de l’essai de 1987, apparaissent ainsi comme les cas d’études choisis pour structurer la section « The Death of the Author » du cours « Postmodern Art 1971-1986 ». Owens aborde leur travail à partir du texte de Barthes ainsi que « Art and Objecthood » (1967) de Michael Fried, et « The Originality of the Avant-Garde » (1981) de Rosalind Krauss, références récurrentes dans les trois bibliographies. Les sections « The Death of the Author » et « The Birth of the Viewer » permettent ainsi de revenir, à partir des notions de spectateur et d’originalité, sur le débat du modernisme et du postmodernisme qui a marqué la première période des écrits d’Owens. Alors doctorant de Krauss dans le tout nouveau programme « History of Art Criticism » créé en 1977 au Graduate Center de The City University of New York aux côtés de Douglas Crimp, Rosalyn Deutsche et David Deitcher, Owens a bénéficié de l’espace pédagogique effervescent offert par le séminaire doctoral animé par sa directrice de recherche et la revue October à laquelle il participe jusqu’en 1980, pour élaborer ses premiers essais marqués par la French Theory.63
C’est également ce contexte qui lui a permis de découvrir les artistes associé·es à la célèbre exposition Pictures organisée par Crimp à Artists Space en 1977, comme Sherrie Levine mentionnée ci-dessus, et sur lesquels Owens écrit notamment dans la deuxième partie de « The Allegorical Impulse » (1980). La section « The Birth of the Viewer » du cours « Postmodern Art 1971-1986 » articule les pratiques dites minimalistes et post-minimalistes des années 1960-1970 de Robert Morris, Dan Graham et Bruce Nauman avec les stratégies d’appropriation de Jack Goldstein et Richard Prince.64 Ces dernières y sont analysées grâce à la lecture des textes de Buchloh et de Crimp, notamment la version de « Pictures » parue en 1979 dans October.
En mettant en avant les questions présentes dans la première partie de l’essai « From Work to Frame », Owens choisit ainsi de ne pas structurer ces sections qui font retour sur les questionnements marquants de la première période de son travail autour de la relecture postmoderne de la photographie pourtant prépondérante lors de sa collaboration avec Crimp et Krauss. Tous trois publièrent dans le numéro 5 d’October de l’été 1978 consacré à la photographie, des essais initialement rédigés dans le cadre du séminaire doctoral de Krauss. Après avoir investigué la photographie, cette dernière élabora la notion de postmodernisme, permettant de rendre visible le refoulement de la copie dans le discours moderniste et d’élaborer « un discours de la reproduction sans original »65 pour la peinture et la sculpture. Dans les trois bibliographies d’Owens, les seules sections qui touchent à la photographie sont intitulées « Reinventing Documentary » et mettent en avant la lecture sociale et politique des conventions de représentation dans la tradition documentaire défendue par Martha Rosler, Allan Sekula et Fred Lonidier.
Ce parti pris reflète la distance qu’Owens a pris avec cette première phase de son parcours. À propos de son implication dans October, il dit en 1984 : « Dans une certaine mesure, mon travail était une série de notes de bas de page aux écrits de Rosalind. J’écrivais dans les marges de ses écrits, pour renforcer sa position théorique, ce qui est une façon comme une autre, peut-être, de commencer à écrire. »66 Il est vrai que les écrits d’Owens sont à l’époque toujours pensés en dialogue avec ceux de Krauss et de Crimp, comme s’ils « s’écrivaient les uns aux autres ».67 Les textes d’Owens comme « Earthwords » (1979) ou « The Allegorical Impulse » (1980) témoignent néanmoins d’un goût pour des pratiques hybrides et pour la fragmentation qu’elles opèrent sur la notion même de médium. Or, comme le remarque Hal Foster dès 1982, une prééminence du médium résiste et subsiste au sein du postmodernisme d’October. Foster revient sur le texte emblématique de Krauss, « Sculpture in Expanded Field » (1979), qui propose de définir la sculpture non plus par la matérialité du médium propre au modernisme, mais par un élargissement incluant le paysage et l’architecture aux côtés de la sculpture permettant de créer les nouvelles catégories que sont les « sites marqués », la « construction de sites » et les « structures axiomatiques ». Foster estime : « l’oeuvre est libérée du terme ‘sculpture’ […] mais seulement pour être liée aux autres termes que sont ‘paysage’, ‘architecture’, etc. Bien qu’elle ne soit plus définie dans un seul code, la pratique reste circonscrite à un champ. Décentrée, elle est recentrée : le champ est (précisément) ‘élargi’ plutôt que ‘déconstruit’. »68 Au-delà de désaccords personnels, la rupture d’Owens avec Krauss relève peut-être de cet attachement au médium sous-jacent et contradictoire avec ce que semblait annoncer sa théorisation du postmodernisme.69
« The Conventional Attitude »
Bien qu’il quitte October en 1980, Owens n’abandonne cependant pas la lutte contre la réaffirmation de l’héroïsme et de l’autorité de l’artiste qu’exprime le succès de la peinture expressionniste figurative sur la scène internationale occidentale au tournant des années 1970 et 1980. Ce phénomène a en effet fait ressentir aux rédacteurs d’October, dès l’automne 1979, l’urgence d’affirmer un postmodernisme qui « se distingue de l’attachement nostalgique à un ensemble de conventions dépassées qui caractérisent le néo-modernisme d’aujourd’hui ».70 La récurrence des prises de position d’Owens, au sein d’Art in America, contre la conception de l’art alimentant ce phénomène artistique montre à quel point ce dernier a été structurant dans les débats de la première moitié des années 1980, tant et si bien qu’Owens lui consacre les sections « The Conventional Attitude », « History/Memory/Archeology » ou encore « Revivalism » dans ses bibliographies.
Adhérent aux attaques lancées contre le discours soutenant le néo-expressionisme au début de la décennie, Owens inscrit au programme de lecture de « Postmodern Art 1971-1986 » et « Contemporary Art and Criticism », l’essai « Condensation and Dish Placement » des mystérieux « Holy Ghost Writers »71 critiquant la perpétuation du mythe du génie mis en scène par Julian Schnabel et ses galeristes, ainsi que l’essai de Benjamin Buchloh « Figures of Authority, Ciphers of Regression : Notes on the Return of Representation in European Painting » (1981).72 Comme ce dernier, Owens considère que le succès de la peinture figurative contribue à former un climat culturel autoritaire. Dans « Honor, Power, and the Love of Women » (1983), Owens estime que l’impératif anti-autoritaire de transgression propre au modernisme est devenu la norme dans le champ de l’art, par conséquent : « Nous assistons donc à l’émergence d’un nouvel autoritarisme – ou d’un renouveau – qui se fait passer pour un anti-autoritarisme. Aujourd’hui, acquiescer à l’autorité est proclamé comme un acte radical ».73 Le néo-expressionnisme est pour lui emblématique de ce processus d’inversion au sein duquel les contradictions disparaissent et qui est le signe de l’implosion culturelle généralisée décrite par Jean Baudrillard dans « The Beaubourg-Effect, Implosion and Deterrence ».74
Ne limitant pas son enseignement à un duel simpliste entre les pratiques des artistes aujourd’hui qualifiés de génération Pictures et celles du néo-expressionnisme, Owens propose également de revenir sur des approches de la peinture qui incorporent la photographie, apparues au début des années 1980. Dans son cours « Postmodern Art 1976-1981 », David Salle et Thomas Lawson apparaissent ainsi aux côtés de Julian Schnabel comme des cas d’étude de la section « The Conventional Attitude ».75 L’essai « Last Exit : Painting », paru dans Artforum en octobre 1981, de Lawson, peintre et critique d’art ayant fondé REAL LIFE Magazine, y est inclu et apparaît également dans la section « Revivalism » du cours « Contemporary Art and Art Criticism ».76 Répondant à la proclamation de la fin de la peinture de Crimp,77 Lawson y estime que les artistes associés à l’exposition Pictures qui travaillent avec la photographie, devraient au contraire appliquer leur pratique de l’appropriation au médium pictural afin de développer une stratégie d’infiltration visant à déstabiliser le marché de l’art. La réponse qu’Owens rédige à cet article en janvier 1982 permet d’imaginer la manière dont il a pu mettre en perspective ce texte dans son enseignement: revenant sur le cas de David Salle, mis en avant dans l’essai de Lawson comme un exemple de cette démarche d’infiltration par la peinture, Owens estime alors que loin de produire une déconstruction critique de la rhétorique des images, la peinture de ce dernier « dépouille les images de leur résonance publique afin de les récupérer pour la subjectivité » et ne produit ainsi qu’une « retraite dans la psyché ».78
Dans la section « The Conventional Attitude » de son cours « Postmodern Art 1971-1986 », Owens choisit également de mettre en lien ces débats du début des années 1980 avec ceux qui apparaissent en 1986 autour des démarches de Jeff Koons, Haim Steinbach ou Ashley Bickerton, que l’on rassemble alors sous le terme « simulationnisme ». Les lectures retenues, pour ce faire, sont l’essai « The Crisis in Geometry » (1984) du peintre Peter Halley et l’article intitulé « Signs Taken for Wonders » publiée dans Art in America en juin 1986 par Hal Foster. Pour ce dernier, les œuvres de ces « nouveaux peintres quasiment abstraits » comme Halley désamorcent le potentiel critique des modes d’abstraction historiques qu’elles simulent, et les réduisent à un ensemble de conventions stylistiques parmi d’autres. Foster considère que : « Loin d’être critique… cette attitude conventionnelle est conforme à notre économie de signes et de simulations. »79 Owens, qui n’a jamais écrit sur ces artistes, adhère à cette critique. Il estime dans un entretien en 1987 que les simulationnistes « se sont appropriés la figure de l’artiste qui lit, écrit et parle de théorie », si bien que « [l]a théorie a perdu toute dimension critique ».80 Comme le néo-expressionnisme qui transforme par la citation toute émotion en un répertoire de signes,81 le simulationnisme se caractérise par le « fétichisme du signifiant » et la « passion du code » que Jean Baudrillard considère comme emblématique de la société contemporaine dans « Fétichisme et idéologie ».82 Owens propose d’ailleurs ce texte dans l’entrée « The Conventional Attitude » de la bibliographie « Seminar in Theory and Criticism ».
Aux différents cas d’études listés dans la section « The Conventional Attitude » dans la bibliographie « Postmodern Art 1971-1986 », s’ajoute encore la figure d’Allan McCollum. Bien qu’ayant été également associé au simulationnisme, Owens considère sa démarche comme étant d’un autre ordre. Dans le texte qu’il lui consacre en 1983, il estime en effet que ses peintures monochromes quasi-génériques plus ou moins identiques, intitulées Surrogates, représentent l’avènement d’une culture de la consommation où la différence n’est que répétition, tout en réussissant, cependant, à rendre à cette dernière son « pouvoir critique – voir même révolutionnaire ».83
Representation and Sexuality
Comme en témoignent son implication dans ces débats artistiques, Owens envisage la critique d’art comme une activité partiale et politique. En 1981, dans le compte-rendu « The Critic as Realist » qu’il consacre à la traduction récente d’Essays on Realism du philosophe marxiste hongrois Georg Lukács, Owens écrit : « Compte tenu de la politique non-interventionniste de la critique de l’art contemporain, le moment est venu, je crois, de réitérer l’appel de Baudelaire à l’engagement critique. »84 Dans ce texte aux accents programmatiques, Owens plaide pour une critique d’art qui déjoue la nostalgie moderniste inhérente au néo-expressionnisme. S’inspirant de l’approche de Lukács, il envisage « la critique comme étant avant tout une forme d’activisme politique, intervenant dans le développement de l’art et le façonnant directement ».85 Penser la critique d’art comme une praxis va devenir une préoccupation importante dans les écrits qu’il consacre aux questions liées à la représentation et à la sexualité, questions qu’il intègre également dans son enseignement. Il les aborde en effet dans la section « Representation and Sexuality » dans les bibliographies « Postmodern Art 1971-1986 » et « Contemporary Art and Art Criticism », ou encore sélectionne des textes emblématiques de ce champ de réflexion féministe dans la rubrique « The Birth of the Viewer » du cours « Seminar in Theory and Criticism ».
Owens initie sa réflexion sur le féminisme en 1983 avec son essai « The Discourse of Others : Feminists and Postmodernism » dans lequel il affirme que « la présence d’une voix féministe insistante »86 est l’un des aspects les plus importants de la culture postmoderne. Il y attaque l’approche marxiste de Fredric Jameson dans The Political Unconscious (1981) qui considère que, pour être prises en compte, les subjectivités exclues de la culture hégémonique doivent être d’abord « réécrites »87 en termes de classe sociale. Pour Owens, cette démarche est le signe d’un attachement persistant à la notion de grand récit et d’un « désir pour la modernité ».88 Les ambitions totalisantes d’un discours théorique, comme le marxisme, de pouvoir expliquer toutes les formes d’expérience sociale, nécessitent, selon lui, le maintien d’« une distance qui objectifie et domine » l’objet d’étude. Dans un entretien de 1987,89 il ajoute que cette approche théorique se traduit également dans la manière surplombante dont Jameson aborde les œuvres comme des symptômes à diagnostiquer.
Rejetant pour sa part une division du travail entre artiste et critique d’art, Owens considère que les artistes féministes, comme Martha Rosler, qui ne se conforment pas à l’opposition moderniste entre théorie et pratique, produisent des analyses culturelles aussi valables que celles des critiques et théoricien.nes d’art. Cohérent avec cette position de principe, Owens invite à publier dans Art in America, où il est rédacteur, des artistes féministes comme Silvia Kolbowski, Jane Weinstock ou encore Lynne Tillman.90
Revenant en 1987 sur sa propre pratique de critique d’art, Owens estime de plus qu’il ne s’agit pas pour lui d’écrire « sur ces pratiques critiques et oppositionnelles mais à leurs côtés. » Il ajoute : « Un échange avait lieu, et chacun menait, dans sa propre démarche critique, le même type de travail dans une autre arène et d’une autre manière. »91 L’exposition « Difference » : On Representation and Sexuality92 est emblématique de cet échange entre critique et artiste. Organisée par Kate Linker et Jane Weinstock au New Museum à l’hiver 1984-1985, cette exposition visait à réfléchir par le biais de pratiques artistiques et théoriques sur les manières dont la représentation est informée par la différence sexuelle. Elle a rassemblé entre autres des œuvres de Ray Barrie, Hans Haacke, Barbara Kruger, Sherrie Levine, Jeff Wall, Marie Yates, Martha Rosler, Dara Birnbaum, Mary Kelly, Victor Burgin, Silvia Kolbowski.93 Owens y contribue en publiant l’essai « Posing » dans le catalogue de l’exposition, dans lequel il étend aux œuvres de Burgin, Kolbowski, Kelly, Levine, Wall et Haacke, une réflexion sur la rhétorique de la pose comme stratégie de protection qu’il élabore à partir de la pensée de Lacan sur la fascination scopique et de celle de Joan Riviere sur la féminité comme mascarade.94 Issues de la Film Theory, de la Gaze Theory, de la théorie lacanienne et de sa relecture féministe, notamment défendue par le journal britannique Screen, les références théoriques qu’Owens mobilise, sont également partagées par les artistes exposées. En témoignent par exemple les échanges lors de la table ronde « Sexual Identity : You Are Not Yourself » organisée dans le cadre de l’exposition, modérée par Kate Linker, et rassemblant les artistes Jane Weinstock, Victor Burgin, Judith Barry, Mary Kelly, la théoricienne Laura Mulvey et Owens lui-même.95
Les références bibliographiques proposées dans les sections « Representation and Sexuality » des bibliographies « Contemporary Art and Art Criticism » et « Postmodern Art 1971-1986 », sont directement liées à cette exposition et témoignent de l’importance qu’Owens lui accorde. Pour étudier les pratiques de Mary Kelly, Victor Burgin, Silvia Kolbowski et Cindy Sherman, retenues comme cas d’études dans la bibliographie « Postmodern Art 1971-1986 », Owens sélectionne des textes et entretiens de Kelly et Burgin ainsi que le célèbre essai « Visual Pleasure and Narrative Cinema » (1975) de Laura Mulvey, qui est abondamment cité dans les essais du catalogue de l’exposition.96 Il leur associe l’article « Representation and Sexuality » (1983) de la curatrice Kate Linker, dont l’essai pour le catalogue Implosion (1987) – dans lequel est aussi publié « From Work to Frame » – figure également dans la bibliographie « Contemporary Art and Criticism ».97 Cet essai intitulé « When a Rose Only Appears to Be a Rose: Feminism and Representation, » reprend notamment les différentes notions lacaniennes mobilisées par les artistes discutées dans le catalogue de Difference, en se référant abondamment aux essais d’Owens. Enfin, des textes de Mary-Ann Doane, Jacqueline Rose et Stephen Heath, issus du même champ référentiel féministe, sont également proposés dans la section « The Birth of the Viewer » du cours « Seminar in Theory and Criticism ».
La rencontre entre la richesse des pratiques artistiques et théoriques de ce contexte féministe a contribué à imposer Difference comme une exposition marquante des années 1980, tant et si bien que l’appellation « féminisme postmoderne » ou « féminisme théorique des années 1980 » lui est souvent associée.98 Cet ensemble d’artistes et théoricien.nes ne représente pourtant qu’une partie des pratiques féministes de l’époque, et ne prend par exemple pas en compte les démarches associées au Black Feminism.99 L’importante réception de « The Discourse of Others : Feminists and Postmodernism », essai au sein duquel Owens exemplifie le féminisme dans le champ artistique par les pratiques d’artistes féministes telles que Rosler, Kelly, Sherman, Birnbaum, ou encore Kruger, que l’on retrouve également dans l’exposition Difference, a certainement contribué à cette surreprésentation. Même si elles ne relèvent que d’une part congrue du féminisme blanc, il faut cependant reconnaître qu’Owens consacre une réelle place à ces pratiques informées par le féminisme dans sa pensée et son enseignement, au moment même où Griselda Pollock déplore le sexisme dominant dans les écoles d’art.100
Owens cherche de plus à articuler cet espace théorique et artistique féministe avec celui des approches queer, vers lesquelles il se tourne à la fin des années 1980. En témoigne notamment l’un de ses derniers textes « Outlaws : Gay Men in Feminism » (1987). Dans cet essai, Owens prône une alliance entre les démarches politiques féministes et homosexuelles, en soulignant « le lien profond existant entre la misogynie et l’homophobie dans notre culture ».101 Dans la section « Representation and Sexuality » du cours « Postmodern Art 1971-1986 », Owens propose ainsi d’étudier aux côtés des pratiques féministes de Cindy Sherman, Mary Kelly, Silvia Kolbowski et Victor Burgin, celle du cinéaste, artiste et activiste canadien John Greyson dont les films de la fin des années 1980, comme Pissoir (1988), traite des mesures de répression policière à l’encontre des lieux de rencontre homosexuels.102
La surveillance des corps à l’époque moderne est d’ailleurs une question qu’Owens choisit d’aborder dans cette même section « Representation and Sexuality » avec un entretien de Michel Foucault intitulé « L’œil du pouvoir » (1977). Foucault y présente la réflexion qu’il a initiée à partir de la pensée de Jeremy Bentham sur le panoptique et développée dans Surveiller et punir. Naissance de la prison (1975).103 Grand amateur de la pensée de Foucault à laquelle il se réfère dans plusieurs de ses essais, Owens intitule, d’après cet entretien, une section « The Eye of Power » dans le cours « Seminar in Theory and Criticism », dans laquelle il propose à la lecture plusieurs de ses ouvrages ainsi que des textes de philosophie, d’anthropologie et d’analyse culturelle d’auteurs tels que Jacques Derrida, Michel de Certeau ou James Clifford permettant d’articuler une discussion autour de la technologie du pouvoir et l’économie politique des corps.
Enfin, Owens souhaite également exposer ses étudiant·es à la littérature postcoloniale et aux questions d’impérialisme et de colonialisme, auxquels il s’intéresse depuis le milieu des années 1980 comme en témoigne l’essai « Improper Names »104 qu’il consacre au travail de Lothar Baumgarten. Ce dernier sert ainsi de cas d’étude autour duquel Owens structure la section « Legacies of Imperialism » du cours « Postmodern Art 1971-1986 », tandis que la section « Criticism from the Margin » qui clôture la bibliographie « Seminar in Theory and Criticism » propose un choix de textes issus des subaltern studies allant de Gayatri Chakravorty Spivak, à Homi Bhabha, Stuart Hall et Edward W. Saïd.
Ces trois bibliographies offrent donc une traversée des questions importantes qui ont marqué le parcours de critique d’art effectué par Owens, à l’aune des réflexions qu’il développe à la fin des années 1980 autour de l’analyse du cadre institutionnel, des politiques sexuelles et de l’oppression impérialiste. Ce faisant, Owens dresse une histoire de l’art actuel, mettant en lumière de manière partisane les enjeux théoriques qui ont animé le monde de l’art professionnel des États-Unis des années 1980, en rassemblant des cas d’études et des textes qui retracent les débats dont il a été partie prenante. Il faut par ailleurs imaginer ces discussions théoriques mises en perspective avec la compréhension concrète de l’économie politique du milieu développée par Owens dans sa propre pratique professionnelle, ce dont l’entretien réalisé avec Anders Stephanson pour Social Text en 1987 donne un vif aperçu.
Le Séminaire « The Political Economy of Culture » en 1988
Parallèlement à ces enseignements, Owens conçoit au printemps 1988 un séminaire de Master pour The School of the Art Institute de Chicago qui lui donne l’occasion de pleinement donner corps à l’approche fonctionnelle prônée par Peter Bürger. Intitulé « The Political Economy of Culture », ce séminaire permet à Owens d’élargir et d’approfondir la réflexion exposée dans « From Work to Frame ». Comme le montre la bibliographie de neuf pages, reproduite dans Beyond Recognition,105 plusieurs références présentes dans l’essai de 1987 comme les écrits de Martha Rosler, Mary Kelly et Allan Sekula y figurent aux côtés des écrits et de commentaires sur le travail des artistes associés à la Critique Institutionnelle qui y sont également discuté.e.s. Ces références voisinent avec une littérature d’obédience marxiste composée d’articles d’histoire sociale de l’art, de sociologie de l’art, de Media Studies, de French Theory, de philosophie de l’École de Francfort, de Postcolonial Studies, de Film Theory, de New Economic Criticism.
L’ambition d’Owens est de proposer au sein de l’une de ces formations artistiques supérieures qu’il décrit comme étant axée sur « une exploration et une expression de soi »,106 un enseignement sur les conditions politico-économiques de la production artistique. La valeur esthétique d’une œuvre y est ainsi considérée comme émanant non pas uniquement de l’artiste, mais d’une « entreprise collective »107 prenant en compte l’ensemble des acteurs du champ de l’art, du critique à l’historien d’art, au médiateur, au régisseur d’œuvre, au collectionneur et au marchand. Pour ce faire, le séminaire s’est concentré sur une discussion des processus de production et de valorisation de la marchandise décrits dans le premier livre du Capital de Karl Marx108 – ouvrage qu’Owens avait déjà fréquenté dans le cadre du groupe de lecture qu’il lui avait consacré à l’été 1985 avec Mark Dion, Gregg Bordowitz et Jason Simon, alors étudiants à l’ISP. Comme Owens l’explique: « Cela implique de proposer de passer d’une politique de production à une politique de circulation, ou plutôt de rejeter la séparation des deux. La tendance à considérer la production artistique dans le capitalisme avancé comme la survie d’un mode de production artisanal – d’un travail non aliéné – doit être rejetée. »109
Cette approche résonne avec les mutations économiques que connaît alors le champ de l’art, au tournant des années 1980-1990, avec l’émergence des pratiques artistiques qualifiées de « project work ». Dans le texte de présentation de l’« exposition du groupe de travail » intitulée Services en 1993, Andrea Fraser et Helmut Draxler décrivent ces pratiques qui « impliquent une dépense en quantité de travail qui soit excède, soit est indépendante de toute production matérielle spécifique et qui ne peut être négociée comme un produit ou avec un produit. Ce travail […], en termes économiques, serait appelé prestation de services (par opposition à la production de marchandises) ».110 En devenant des fournisseurs de services culturels plutôt que des producteurs d’objets esthétiques, les artistes se trouvent soumis aux dictats professionnels entrepreneuriaux néolibéraux du réseau, de l’auto-motivation, de la flexibilité, et de la mobilité. Les artistes deviennent emblématiques de la figure du travailleur créatif du capitalisme cognitif qui se met alors en place. La morphologie que ces pratiques adoptent, évoque en effet à bien des égards la temporalité, l’investigation méthodologique, la production de connaissance, les formes de transmission, ainsi que la précarité économique de la recherche académique aux prises avec la restructuration néolibérale des universités. Comme l’explique Andrea Fraser: « Les artistes ont souvent l’esprit d’entreprise, et le travail par projet est l’une des pratiques contemporaines qui nécessite le plus cet esprit… J’irais même plus loin en disant que nous sommes le modèle même du travail dans la nouvelle économie, un fait qui n’est ni une étrange ironie ni un caprice du destin, mais qui est profondément ancré dans notre ‘habitus’ ».111
Concevant les situations d’enseignement comme un laboratoire pour réfléchir, Owens dessine à l’issue de ce séminaire les grandes lignes d’un ouvrage dont le titre provisoire était Cultural Economy. S’il décède avant d’avoir pu le rédiger, ce projet avait déjà suscité en 1989 l’intérêt de University of Minnesota Press et de l’éditeur britannique Methuen.112 Son analyse se serait plus spécifiquement consacrée à l’impact sur les artistes et leurs pratiques, des investissements massifs de capitaux internationaux dans le monde de l’art depuis le milieu des années 1970.113 On peut imaginer que le cas de la vente record le 30 mars 1987 de Still Life – Vase with Fifteen Sunflowers (1888) de Vincent Van Gogh pour un montant de 38,9 millions de dollars à Yasuda Fire and Marine Insurance Company à Tokyo discuté en ouverture de « The Yen for Art » (1987) en aurait fait partie.114
Entre 1987 et 1989, Owens élabore donc ses enseignements théoriques avec le souhait de traiter l’activité culturelle « comme une profession ». Traverser les trois bibliographies des cours correspondant à la période où il enseigne à Yale University, University of Virginia, Barnard College laisse en effet entrevoir en creux la manière dont le critique d’art s’engage dans le champ professionnel par ses prises de position, et comment celles-ci s’articulent à une lecture précise de la complexité de la société contemporaine. Les pratiques artistiques sélectionnées y sont abordées comme autant d’occasions de réfléchir les enjeux théoriques de la culture postmoderne, et d’analyser les multiples cadres institutionnels dans lesquels elles sont produites et reçues. Le séminaire « The Political Economy of Culture » prodigué à The School of the Art Institute de Chicago se concentre, à cet égard, spécifiquement sur l’analyse des conditions de production artistique du monde de l’art. Dans ces différents enseignements, l’étudiant·e est initié·e à une cartographie d’outils méthodologiques issus de corpus théoriques variés et manipulés par les acteur·rices qui élaborent la conversation au sein du champ de l’art contemporain, lui permettant ainsi de se situer dans celle-ci. Ces cours témoignent donc de la volonté d’Owens d’offrir un enseignement à même de promouvoir la « pratique culturelle matérialiste » qu’il appelle de ses vœux en conclusion de « From Work to Frame ». L’articulation entre théorie et pratique que celle-ci suppose va cependant plus prendre forme au sein du projet pédagogique qu’Owens élabore pour le poste de l’université de Rochester, et dans lequel il affirme l’élargissement de sa réflexion depuis le champ artistique vers le champ culturel.
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- 46. « as a profession » Owens, version finale de CLUR.
- 47. « a great deal of time is devoted to texts on historiography, sociology, language, subjectivity and ideology, in an effort to provide students with the tools necessary to map places – as artist, critics, historians, administrators, even as (informed) audience members – within the complex social world to which cultural production belongs? » Ibid.
- 48. « knits the art village together on all levels […]. The language of high theory has come to serve a genuinely integrative function for the art community as it actually exists, gathering a wide variety of practices under its wings. » Thomas Crow, « Versions of Pastoral in Some Recent Art, » in American Art in the Late Eighties: The Binational, eds. David. A. Ross, Jürgen Harten (Boston: Institute of Contemporary Art and Museum of Fine Arts, 1988), 20–22.
- 49. Jean-Michel Rabaté, The Future of Theory (Oxford: Blackwell, 2002), 1.
- 50. « Many contemporary artists find a combination of disparate disciplines necessary to the continuing vitality of their art. The articulate artist is now the rule rather than the exception… If a goal for education were to be proposed, perhaps it could be to unseat the mind and inflame the intellect. » Mel Bochner, « Some Thoughts, » The Utterer (April 1970): n. p. En 1972, le même type de constat est dressé par le critique Harold Rosenberg in « La formation des artistes, » in La Dé-définition de l’art [1972], trans. Christian Bounay (Nîmes: Jacqueline Chambon, 1992), 38.
- 51. Voir Katia Schneller, «’Professionalism in the Arts.’ L’enseignement à la School of Visual Arts entre 1965 et 1975, » in Transmettre l’art. Figures et méthodes – Quelle histoire ?, eds. Valérie Mavridorakis and Christophe Kihm (Dijon: Presses du réel, 2012), 153–171. Sur les relations étroites qui se tissent entre pratiques artistiques et théoriques, voir French Theory and American Art, eds. Anaël Lejeune, Olivier Mignon, Raphaël Pirenne (Brussels: SIC, 2013), et Anaël Lejeune, La théorie à l’œuvre – L’art conceptuel américain (Brussels: SIC, 2017).
- 52. « appears to be a genre of academic art finely adapted to the pressures of the new university habitat. » Judith Adler, Artists in Offices (New Brunswick, N.J.: Transaction Books, 1979), 17.
- 53. Voir Howard Singerman, « Professing Postmodernism, » in Art Subjects, 157–159, 178–179.
- 54. « the theoretical discourse is not in any way dominant within art schools. But it seems interesting that there are various people positioned throughout the academy that introduced this. » Craig Owens in Anders Stephanson, « Interview with Craig Owens, February 27, 1987, » Social Text, no. 27 (1990); repris in Beyond Recognition, 313.
- 55. Voir note 39.
- 56. Si le guide de la College Art Association (CAA) de 1984 ne dénombrait que 3 professeur·es spécialisés en « art contemporain » parmi les 47 programmes doctoraux existant alors aux États-Unis, on en compte 16 parmi les 55 programmes figurant dans le guide de 1995. Dans le guide du CAA de 1984, seule Ann Gibson, avec qui Owens a travaillé à Yale, apparaissait comme ayant la spécialité « Art since 1945 ». Plusieurs diapositives de la collection d’Owens produites pour son enseignement à Yale détiennent l’indication « Dup. Ann Gibson ». Voir les slides n° 32, 33, 67, 88, 104, 200, 443, 444, 445, 446, 447, 450, 451, 453, 456.
- 57. « much needed conceptual and historical framework for courses in ‘Postmodern culture’ » Owens, version finale de CLUR.
- 58. « I believe that such a book will also interest non-academic readers. » Ibid.
- 59. « especially given the fact that many positions I would no longer defend have proven to be rather influential » Ibid.
- 60. Voir la section “Pedagogy,” in Beyond Recognition, 329–344.
- 61. « A consideration of the recent displacement of critical practice away from the interpretation and evaluation of individual works of art and onto the analysis of the multiple frames within which artistic production and reception are contained. » Craig Owens, « Seminar in Theory and Criticism, » in Beyond Recognition, 339.
- 62. Comme le montrent les diapositives n° 201, 205, 202 et 203, Owens commande des reproductions de 2 images (n° 46 et 621) de Marcel Broodthaers, issues du Catalogue des Livres 1957-1975, Galerie Michael Werner, Köln, et 5 (n° 28, 569, 570, 580, 585) de celui de la Tate Gallery, 13 (n° 20, 21, 22, 36, 37, 73, 280, 281, 282, 571, 572, 573) de Michael Asher, Writings about Works, et 11 (589, 590, 591, 598, 603, 619) de Hans Haacke, Unfinished Business. Ces séries étant indexées CO 87 11 à 14 ont pu être réalisées pour le cours d’Owens à Barnard College ou à University of Virginia – les autres lieux d’enseignement étiquetant habituellement leur nom sur les diapositives produites en interne.
- 63. Sur les différents statuts qu’Owens a occupé au sein d’October, voir la chronologie présente dans ce dossier. Voir sur cette période, Craig Owens. Portrait of a Young Critic, eds. Lyn Blumenthal, Kate Horsfield (New York: Baldlands Unlimited, 2018). Sur l’engouement pour la French Theory, voire entre autres François Cusset, French Theory. Foucault, Derrida, Deleuze et Cie et les mutations de la vie intellectuelle aux États-Unis (Paris: La Découverte, 2003) ; Peter E. D. Muir, Against the Will to Silence : An Intellectual History of the American Art Journal October between 1976 and 1981, Ph.D dissertation in Philosophy, Advisor : Julie Sheldon (Liverpool: John Moores University, 2003) ; French Theory and American Art, eds. Anaël Lejeune, Olivier Mignon, Raphaël Pirenne (Brussels: SIC, 2013).
- 64. La cinquantaine de diapositives conservées dans la collection d’Owens reproduisant des œuvres de Richard Prince issues des séries des hommes en costumes, Untitled (Pen) ou Untitled (Sunset) du tournant des années 1970-1980, semblent d’ailleurs avoir été réalisées principalement pendant cette période liée à October. Owens qui n’a que brièvement évoqué Prince dans « The Discourse of Others: Feminists and Postmodernism » (1983) et « Under Arrest » (1984), a peut-être eu besoin de ces diapositives dans le cadre de son enseignement au département d’histoire de l’art du Hunter College de 1978 à 1981 où Krauss était professeure ou à The Institute for Architecture and Urban Studies en 1979.
- 65. Voir Rosalind Krauss, “L’originalité de l’avant-garde : une répétition post-moderniste » (1981), in L’originalité de l’avant-garde et autres mythes (Paris : Macula, 1993), 147.
- 66. « To some extent my work was a series of footnotes to Rosalind’s writing. I wrote in the margins of her writing, to reinforce her theoretical position, which is as good a way as any, perhaps, to begin to write. » Voir Craig Owens. Portrait of a Young Critic, 66–67.
- 67. « were writing to each other » Ibid., 67.
- 68. « the work is freed of the term ‘sculpture’… but only to be bound by other terms, ‘landscape’, ‘architecture,’ etc. Though no longer defined in one code, practice remains within a field. Decentered, it is recentered: the field is (precisely) ‘expanded’ rather than ‘deconstructed’. » Hal Foster, « Re: Post, » Parachute, no. 26 (printemps 1982); repris in Art After Modernism: Rethinking Representation, ed. Brian Wallis (New York: New Museum of Contemporary Art, 1984), 189–202.
- 69. Depuis la fin des années 1990, face à ce que Krauss perçoit comme une obsolescence et une explosion du médium et dont l’art de l’installation serait la quintessence, son attachement profond au médium s’est affirmé. Prenant acte de la transformation d’ensemble de l’art en art-en-général, c’est-à-dire le caractère générique de l’art indépendant de toute spécificité et support traditionnel propre à la condition post-médium, Krauss s’est lancé dans une reconquête du medium pour lui-même, qu’elle qualifie également de « support technique ». Elle va même jusqu’à déplorer l’interprétation littérale qui a été faite de la spécificité du medium de Greenberg. Elle assigne ainsi aux artistes depuis quinze ans l’« obligation d’arracher à ce support un nouvel ensemble de conventions esthétiques auxquelles leurs œuvres peuvent ensuite se conformer de manière réflexive, s’ils veulent les intégrer au canon du modernisme », « Two Moments from the Post-Medium Condition», October 116 (printemps 2006) : 55–56.
- 70. « distinguishes it from that nostalgic attachment to a set of exhausted conventions which characterizes today’s neomodernism » The Editors, « Editorial, » October, no. 10 (automne 1979): 4.
- 71. The Holy Ghost Writers, « Condensation and Dish Placement, » REAL LIFE Magazine, no. 9 (hiver 1982-1983): 9–13.
- 72. Benjamin Buchloh, « Figures of Authority, Ciphers of Regression: Notes on the Return of Representation in European Painting, » October, no. 16 (printemps 1981): 39–68.
- 73. « What we are witnessing, then, is the emergence of a new – or, renewed – authoritarianism masquerading as antiauthoritarian. Today acquiescence to authority is proclaimed as a radical act » Craig Owens, « Honor, Power, and the Love of Women, » Art in America (janvier 1983); repris in Beyond Recognition, 149.
- 74. Jean Baudrillard, « The Beaubourg-Effect, Implosion and Deterrence, » trad. Rosalind Krauss, Annette Michelson, October, vol. 20 (printemps 1982): 3–13. Owens mobilise déjà cette critique dans « Bayreuth ‘82, » Art in America (September 1982): 32–139, 191.
- 75. Voir la section « The Conventional Attitude, » in « Postmodern Art 1971-1986, » in Beyond Recognition, 332. Trois œuvres de David Salle datant de 1984-1985 (slides 109, 131, 478) ont été reproduites pour les cours d’Owens à la SVA tandis que St. Francis in Ecstasy (1980) de Julian Schnabel a été reproduite pour les cours à la SVA (slide 366) et à Yale University (slide 104 et 200).
- 76. Thomas Lawson, « Last Exit: Painting, » Artforum 20, no. 2 (octobre 1981): 40-47. Voir la section « Revivalism, » in « Contemporary Art and Art Criticism, » in Beyond Recognition, 338.
- 77. Douglas Crimp, « The End of Painting, » October 16 (printemps 1981): 69–86.
- 78. « strips images of their public resonance in order to reclaim them for subjectivity » « retreat into the psyche » Craig Owens, « Back to Studio, » Art in America (January 1982): 103.
- 79. « new quasi-abstract painters » « Far from critical… this conventionalist attitude complies with our economy of signs and simulations. » Hal Foster, « Signs Taken for Wonders, » Art in America 74, no. 6 (juin 1986): 80.
- 80. « have appropriated a certain figure of the artist who is someone who reads, who writes, who talks theory » « The theory has lost any kind of critical edge » Owens in Anders Stephanson, « Interview with Craig Owens, February 27, 1987, » 315.
- 81. Owens, « Honor, Power, and the Love of Women, » 148.
- 82. Jean Baudrillard, « Fétichisme et idéologie : la réduction sémiologique, » in Pour une critique de l’économie politique du signe (Paris : Gallimard, 1972), 100.
- 83. « critical – even revolutionary – power » Craig Owens, « Allan McCollum: Repetition and Difference, » Art in America (septembre 1983); repris in Beyond Recognition, 120.
- 84. « Given the non-interventionist policy of contemporary art criticism, the time has come, I believe, to reiterate Baudelaire’s plea for critical commitment. » Craig Owens, « The Critic as Realist, » Art in America (septembre 1981); repris in Beyond Recognition, 255.
- 85. « criticism above all as a form of political activism, intervening in and directly shaping the development of art » Ibid., 254.
- 86. « the presence of an insistent feminist voice » Craig Owens, « The Discourse of Others: Feminists and Postmodernism, » 171.
- 87. « rewritten » Fredric Jameson, The Political Unconscious (Ithaca: Cornell University, 1983), 84.
- 88. « desire for modernity » « a distance which objectifies and masters » Craig Owens, « The Discourse of Others, » 176.
- 89. Owens in Anders Stephanson, « Interview with Craig Owens, February 27, 1987, » 307.
- 90. Voir par exemple dans l’édition d’été 1983 d’Art in America: Jane Weinstock, « A Lass, A Laugh, and A Lad, » 7–10 et Silvia Kolbowski, « Covering Mapplethorpe’s Lady, » 10–11. Voir également Lynne Tillman, « Madame Realism Asks: What’s Natural about Painting?, » Art in America (mars 1986): 102, ou « Dynasty Reruns, » Art in America (juin 1986): 35–37.
- 91. « about these critical and oppositional practices but alongside them. » « There was an exchange there, and one’s criticism was conducting the same work in a different arena and in a different way. » Ibid. Pour des exemples de compte-rendus d’exposition d’artistes féministes rédigées par Owens, voir « Phantasmagoria of the Media, » Art in America (mai 1982): 98–99; « Sherrie Levine at A&M Artworks, » Art in America (été 1982): 148; « The Medusa Effect, or The Specular Ruse, » Art in America (janvier 1984): 97–105.
- 92. “Difference”: On Representation and Sexuality, New Museum, New York, 8 décembre 1984 –10 février 1985. L’exposition a ensuite voyagé à la Renaissance Society, University of Chicago (3 mars–7 avril 1985), au List Visual Art Center au MIT (été 1985) et au Institute of Contemporary Arts of London (19 juillet–1er septembre 1985).
- 93. Parallèlement à l’exposition, Jane Weinstock a conçu une programmation de projections des films et des vidéos de Chantal Ackerman, Marguerite Duras, Valie Export, Sheila McLaughlin, Lynne Tillman, Laura Mulvey, Peter Wollen et Yvonne Rainer.
- 94. Owens avait initié cette réflexion sur la rhétorique de la pose dans son essai sur le travail de Kruger « The Medusa Effect, or The Specular Ruse », in Barbara Kruger, We Won’t Play Nature to Your Culture (London: Institute of Contemporary Arts, 1983), 5–11; repris in Art in America 72, no. 1 (janvier 1984); repris in Beyond Recognition, 191–200; « Posing, » in « Difference »: On Representation and Sexuality (New York: New Museum of Contemporary Art, 1985); repris in Beyond Recognition, 201–17.
- 95. Voir l’enregistrement de la table ronde « Sexual Identity: You Are Not Yourself » qui s’est tenue à la New School for Social Research le 12 décembre 1984, online: https://archive.newmuseum.org/sounds/7091, consultée le 15 octobre 2019.
- 96. Victor Burgin, « Photography, Phantasy, Function, » in Thinking Photography, ed. Burgin (London: Macmillan, 1982), 177–216; Tony Godfrey, « Sex, Text, Politics: An Interview with Victor Burgin, » Block, no. 7 (1982): 2–26; Mary Kelly, « No Essential Feminity, » Parachute, no. 26 (printemps 1982): 31–35; Laura Mulvey, « Visual Pleasure and Narrative Cinema, » Screen 16, no. 3 (automne 1975): 6–18. Ces références sont listées dans les sections « Representation and Sexuality » in Beyond Recognition, 332 et 337.
- 97. Kate Linker, « Representation and Sexuality, » Parachute, no. 32 (automne 1983): 12–32; « When a Rose Only Appears to Be a Rose: Feminism and Representation, » in Implosion (Stockholm: Moderna Museet, 187), 391–415.
- 98. Voir par exemple, Thalia Gouma-Peterson, Patricia Mathews, « The Feminist Critique of Art History, » Art Bulletin 69, no. 3 (septembre 1987): 326–357; Kate Mondloch, « The Difference Problem: Art History and the Critical Legacy of Feminism, » Art Journal 71, no. 2 (été 2012): 18–31.
- 99. Voir par exemple le catalogue d’exposition We Wanted a Revolution: Radical Women, 1965-85: A Sourcebook, eds. Catherine Morris, Rujeko Hockley (New York: The Brooklyn Museum, 2017). Sur la blancheur de la pensée postmoderne dans les années 1980 aux Etats-Unis, voir bell hooks, « Postmodern Blackness, » in Yearning, Race, Gender, and Cultural Politics (Boston, MA: South End Press, 1990), 23–33.
- 100. Pollock, « Art, Art School, Culture. Individualism after the Death of the Artist, » 50–67.
- 101. « the profound link between misogyny and homophobia in our culture » Craig Owens, « Outlaws: Gay Men in Feminism, » in Men in Feminism, eds. Alice Jardine et Paul Smith (New York: Methuenn, 1987); repris in Beyond Recognition, 219. Voir également ici dans ce dossier, David Deitcher, « Elusive Affiliation : Craig Owens and Eve Kosofsky Sedgwick ».
- 102. Voir Brenda Longfellow, Scott MacKenzie, Thomas Waugh eds., The Perils of Pedagogy: The Works of John Greyson (Montreal: McGill-Queen’s University Press, 2013).
- 103. Michel Foucault, « L’œil du pouvoir, » entretien avec J.-P. Barou et M. Perrot, in Jeremy Bentham, Le Panoptique (Paris : Belfond, 1977), 9-31 ; Surveiller et punir. Naissance de la prison (Paris : Gallimard, 1975).
- 104. Craig Owens, ‘Improper Names,’ Art in America (October 1986); reprinted in Beyond Recognition, 284–297.
- 105. Voir « Bibliography: The Political Economy of Culture, » in Beyond Recognition, 345–354.
- 106. « self-exploration and self-expression » Owens, Version finale de CLUR.
- 107. « collective enterprise » Craig Owens, « The Institution of Criticism / The Criticism of Institutions, » conférence prononcée en avril 1986 dans le cadre des Baldwin Lectures à Oberlin College; transcription partielle conserve dans les Lynne Tillman Archives, Fales Library and Special Collection; MSS-180, Box: 32; Folder: 2; Fales Library and Special Collections, New York University Libraries.
- 108. Voir Owens, « Snuff, Tobacco and Paintings or, The Yen for Art, » Lynne Tillman Archives, Fales Library and Special Collection; MSS-180, Box: 32; Folder: 2; Fales Library and Special Collections, New York University Libraries.
- 109. « What this entails is proposing a shift from a politics of production to a politics of circulation, or rather, rejecting the separation of the two. The tendency to regard artistic production in advanced capitalism as the survival of an artisanal mode of production – of non-alienated labor – must be rejected. » Ibid.
- 110. « working-group exhibition » « involve the expense of an amount of labor that is either in excess of, independent of, any specific material production and which cannot be transacted as or along with a product. This labor […] in economic terms would be called services provision (as opposed to goods provision) » Helmut Draxler, Andrea Fraser, “Services: A Proposal for an exhibition and a Topic of Discussion,” 1993, in Games, Fights, Collaborations: Art and Cultural Studies in the Nineties, eds. Beatrice von Bismarck, Diethelm Stoller, Ulf Wuggenig (Lüneburg: Kunstraum der Universität Lüneburg, 1996), 196–197.
- 111. « Artists are often highly entrepreneurial, and project work is among the most entrepreneurial of contemporary practices… I would go even further and say that we are the very model for labour in the new economy, a fact that’s not an odd irony or quirk of fate, but deeply rooted in our ‘habitus’ » Andrea Fraser, « A Museum is not a business. It is run in a businesslike fashion, » in Beyond the Box. Diverging Curatorial Practices, ed. Melanie Townsend (Banff: Banff Centre Press, 2003), 120. Voir aussi Pierre-Michel Menger, Portrait de l’artiste en travailleur. Métamorphoses du capitalisme (Paris : Seuil – La république des idées, 2002), 8–9 ; Miwon Kwon, One Place After Another. Site Specific Art and Locational Identity (Cambridge, Mass.: The MIT Press, 2002), 46.
- 112. Voir Owens, Version finale de CLUR.
- 113. Voir Owens, Version finale et brouillon de CLUR.
- 114. Autre exemple des passages entre situation d’enseignement et d’écriture, ce cas a très vraisemblablement été abordé lors d’un cours à la SVA comme en témoigne la diapositive de ce tableau étiquetée « School of Visual Arts Library » dans la collection de diapositives d’Owens. Voir la diapositive n° 471 dans l’inventaire présent dans ce dossier.